Natura 2000 : le travail après la colère
Si, en 2006, les élus locaux étaient montés au créneau contre les périmètres de Natura 2000, aujourd’hui, un comité de pilotage est en place et Asters – Conservatoire des espaces naturels de Haute-Savoie – travaille au document d’objectifs.
En 2005, l’Etat, poussé par l’Union européenne, avait défini des périmètres pour Natura 2000. Dès lors, la quasi-totalité des élus concernés par celui des Aravis* étaient montés au créneau et menaçaient de déposer des recours (JdP n° 56). Les communes reprochaient à l’Etat sa précipitation et surtout son manque de concertation. «La France a beaucoup tergiversé pour définir ses zones d’habitat selon les directives européennes Oiseaux et Faune, flore et habitat, explique Jean-Paul Amoudry, président du comité de pilotage Natura 2000 Aravis. Les périmètres ont été imposés par le ministère de l’Environnement. Les élus n’ont pas été consultés sur ces découpages ni sur les raisons d’un tel découpage. La loi oblige les élus locaux à administrer les zones Natura 2000. Désormais, dans les Aravis, nous nous sommes organisés.»
La directive européenne Oiseaux date de 1979 et celle sur la Faune, flore et habitat de 1992. L’Europe pensait qu’en 2000 l’ensemble des zones à protéger sur son territoire seraient définies et que les documents d’objectifs seraient en place. Un retard certain a été pris, qui est en passe d’être en partie résorbé. «Notre comité de pilotage est en place depuis avril 2007, souligne le président. Ce comité doit définir de manière précise les richesses biologiques et pratiquer les inventaires. D’ici à deux ans, nous devrons faire cet état des lieux dans un document d’objectifs (Docob) puis faire des propositions d’actions pour maintenir la biodiversité par des contrats Natura 2000 et une charte pour les sites naturels et agricoles. Nous commençons par la phase d’inventaire.»
Ce travail a été confié à l’association Asters – Conservatoire des espaces naturels de Haute-Savoie – alors que le syndicat intercommunal Fier-Aravis devenait maître d’ouvrage du document d’objectifs. Pour réaliser le document, Asters se fait aider par la Société d’économie alpestre et le Conservatoire botanique national alpin. Cette phase d’études se chiffre à 90 000 E financés par l’Etat. Parallèlement, trois groupes de travail sont mis en place : sports et tourisme, environnement et chasse, agriculture et forêt. «Ces trois groupes couvrent toutes les réalités du territoire concerné. C’est une façon d’avoir une procédure démocratique pour valider ensuite le Docob. Natura 2000 va faire échanger des gens pour débattre et à terme pour trouver des solutions pour que l’homme puisse vivre dans cette montagne tout comme les espèces fragiles», complète Jean-Paul Amoudry.
«Fin 2008, nous aurons réalisé le diagnostic et mis en évidence les grands enjeux, confie Antoine Rouillon, chargé de mission d’Asters. Le périmètre émane de données scientifiques et objectives. Notre travail consiste à localiser les habitats [milieux naturels, NDLR] et les espèces. Il se fait simultanément avec les groupes de travail qui apporteront des données humaines. Ensuite, les objectifs de conservation seront mis en place en concertation avec les élus, groupes de travail et professionnels. Enfin, les plans d’actions seront définis pour six ans.»
Si, au début, Natura 2000 Aravis pouvait passer pour une contrainte, Antoine Rouillon considère que cet outil «peut être un atout, et même devenir un label pour promouvoir cet espace. Nous donnons de la valeur à un site exceptionnel. Ceux qui auront su préserver et valoriser leurs espaces naturels auront un atout supplémentaire».
Le Docob est donc une démarche concertée. A son issue, des contrats avec l’Etat seront passés avec les propriétaires pour la mise en œuvre de la bonne gestion du site. Si ces propriétaires veulent confier cette gestion à un tiers, ils pourront également le faire.
*Natura 2000 Aravis est divisé en deux périmètres distincts et s’étend dans son ensemble de Marlens à Magland. Il compte au moins douze types d’habitats naturels d’intérêt communautaire, considérés comme menacés à l’échelle du continent européen : pelouse et landes subalpines et alpines, formations végétales associées aux milieux rocheux, forêts de pins de montagne, pessières subalpines, zones humides, etc.
Photo : Antoine Rouillon / Asters