Unique producteur de fromages de brebis
En 2008 Bertrand Aguettand reprend le troupeau de son père et se lance dans la production de fromages de brebis. Il est le premier à Manigod dans cette filière avec pour seul concurrent dans le canton un éleveur de La Clusaz.
Bertrand Aguettand est heureux de faire découvrir sa ferme et ses bêtes et encore plus ses fromages issus du lait de ses brebis. Ce fromage a depuis peu le vent en poupe, plus gras que celui issu de la vache, il est plus riche en protéines et en lipides. C’est en 2008 que le jeune agriculteur reprend les bêtes de son père. «Lorsqu’il est tombé malade s’est posée la question de savoir si on vendait les moutons ou si je m’installais, confie-t-il. Mon père était double actif. En plus de son métier de menuisier il a toujours eu une cinquantaine de brebis pour la viande, qu’il sélectionnait au fil des années.»
Avant cela Bertrand Aguettand a fait ses études à la maison familiale de Cruseilles pour obtenir un BEP puis un bac pro en conduite et gestion d’exploitation agricole. Il a également en poche un certificat de spécialisation en transformation fromagère obtenu à l’école laitière (ENILV) de La Roche-sur-Foron. Il a par la suite travaillé à la fromagerie Paccard de Manigod avant de se lancer seul dans son exploitation. «J’ai repris la maison du grand-père que j’ai refaite pour aménager une salle de traite et une écurie plus grande. J’ai aussi repris les brebis allaitantes pour les traire.»
2 litres pour un fromage
Aujourd’hui il est à la tête d’un troupeau de 120 têtes, toutes de la race Thônes et Marthod. «C’est une race rustique et locale qui est adaptée à la montagne.» Ils sont en tout dix agriculteurs à produire cette race dans les deux départements savoyards pour une population d’environ 4 000 moutons, ce qui la rend relativement rare. «Et nous ne sommes que deux sur le canton à faire du lait de brebis, avec M. Agnelet à La Clusaz. Mais à Manigod il y a une quinzaine d’éleveurs de moutons qui sont tous des doubles actifs.»
Bertrand Aguettand garde l’ensemble de son troupeau à proximité de sa ferme sans monter en alpage. «Je suis seul, c’est donc difficile d’être partout. Et puis j’ai un bâtiment qui va bien.» Il réalise 80% de son foin pour un besoin de 50 t par an, et son exploitation s’étend sur 15 ha. «J’ai deux lots de brebis parce qu’elles font du lait durant 6 à 7 mois. Cela me permet de traire toute l’année. Une brebis produit environ 150 l de lait sur 7 mois avec des pics.» Pour une tommette de 450 g il faut deux litres de lait. «Le rendement fromager est meilleur qu’avec du lait de vache.»
L’agriculteur ne se plaint pas. «Je sais que je travaille pour rembourser mon bâtiment et j’en ai encore pour onze ans. Je ne compte pas mes heures parce que là c’est deux fois par jour et tous les jours.» Il faut aussi savoir jongler avec la météo pour faucher et rentrer le foin.
L’éleveur est content de voir que les gens s’arrêtent pour voir les brebis, acheter du fromage. «Les gens viennent aussi acheter du lait au moment de la traite pour faire du yaourt. Parce que je n’ai pas le temps de le faire.» Il livre également ses fromages dans des restaurants, à l’épicerie du village ainsi qu’à la coopérative de Thônes.
Une chose pourrait lui faire peur : «Pour le moment c’est mon père qui s’occupe de l’administratif. C’est sûr que lorsque je devrai le faire, ce ne sera pas la même histoire. C’est de plus en plus pesant la paperasse.»
Ainsi que la présence du loup. «On en parle et le plus dur serait de perdre une dizaine de brebis. Même si on nous dit qu’on sera indemnisé, ces bêtes ce sont les nôtres, il faut du temps pour faire un troupeau. En plus, en race Thônes et Marthod, ce sera très difficile d’en retrouver, voire impossible, dix d’un coup.» Quoi qu’il en soit il voit aussi qu’il y a de plus en plus de demandes en fromage de brebis. «Cela coûte moins cher de s’installer en brebis qu’en vache. Le marché est loin d’être saturé. Il faudrait bien encore trois ou quatre producteurs à Manigod pour qu’il le soit.»
De conclure : «Il faut arrêter de se plaindre. Si le matin en se levant on n’a pas envie d’aller travailler alors il faut changer de boulot !»
L’exploitation de Bertrand Aguettand est sur la route de la Croix Fry, au lieu-dit le Péroset. Une pancarte indique l’entrée de la ferme. La vente de fromages se fait à partir de 17h et une sonnette permet de prévenir le principal intéressé.
Internet : aguettand-bertrand.e-monsite.com