Courrier des lecteurs - N°129 - Août-Septembre 2018

«Notre ami le Danay»

De M. Pierre Baugey, habitant du Grand-Bornand, moniteur de ski, ancien conseiller technique et sportif de la Jeunesse et des Sports et ancien conseiller municipal.

«Les stations sœurs de La Clusaz et du Grand-Bornand possèdent un trésor à portée de main - le Danay – mais ne s’en servent pas pour l’instant. 

La boutade courante est de dire de part et d’autre que si “les enfants du Grand-Bornand ou de La Clusaz (vice-versa) ont de grandes oreilles, c’est parce que leurs parents les soulèvent par icelles en leur disant : Regarde ce qu’ils font de l’autre côté !”.

Bien sûr, c’est une plaisanterie mais qui pourrait bien refléter ce que les gens pensent au fond d’eux-mêmes.

Il est temps que ce Danay ne soit plus une frontière mais un lien.

Les lois de structuration d’urbanisme mettent en place les Schémas de cohérence territoriale (SCOT) et Super SCOT et de Bassin qui sont des règlements juridiquement supérieurs à nos Plans locaux d’urbanisme (PLU). Il faut nous décider avant qu’il ne soit trop tard. Le SCOT Tournette Aravis est encore ouvert pour quelques mois et il nous faudra ensuite attendre au moins 10 ans une prochaine révision. Il y a donc urgence…

Pour ma part, j’avais noté dans un compte rendu d’assemblée générale d’office du tourisme que l’on se souciait déjà d’une liaison. C’était en 1977. De multiples rencontres ont eu lieu depuis entre les élus de La Clusaz et du Grand-Bornand et n’ont servi pratiquement à rien ou à si peu.

On reparle à présent de cette fameuse liaison, heureusement, mais arrêtons alors de rechercher les problèmes. Mettons en avant notre intérêt d’avenir commun, cessons nos jalousies qui ne font pas avancer. Faisons des efforts pour nous comprendre, et des compromis s’il le faut. L’enjeu est trop important. Il ne serait pas convenable que les concitoyens des deux communes puissent dire de leurs élus dans quelques années : “Ils pouvaient le faire, mais ils n’ont rien fait.”

Je ne vois que de bonnes raisons et pas de mauvaises à réaliser la liaison par le Danay :

– Toutes les tendances vont dans le sens des stations reliées par remontées mécaniques et par pistes ;

– Une liaison par route compte peu, on le sait ;

– La plupart de ces liaisons sont très bénéfiques  ; c’est prouvé notamment par le produit fiscal annuel des communes publié par le ministère du Budget, qui augmente de 15 à 20 % pour les communes les années qui suivent leur liaison ;

– Cette liaison nous ouvrira encore plus les marchés touristiques étrangers qui sont porteurs d’avenir et d’opportunités.

Le Danay est un magnifique outil qui, s’il permettait d’agrandir le domaine skiable du Grand-Bornand, agrandirait aussi celui de La Clusaz (les skieurs ne voient pas de frontière au bout de leurs spatules). Pour La Clusaz, il ouvre en même temps un domaine de proximité (en forêt) que l’on ne retrouve pas ailleurs sur son domaine skiable, hormis Beauregard.

Que dire de l’intérêt que représente le Danay en été pour les deux stations et pour ses voisines, je vous laisse y réfléchir.

Pour terminer, je voudrais dire à ceux qui s’inquiéteraient de la perte d’identité de nos stations qu’il faut regarder ailleurs : 

– Avoriaz, Morzine et Châtel (cette dernière réalise un chiffre d’affaires supérieur en matière de remontées mécaniques à l’une ou l’autre de nos deux sociétés de remontées mécaniques respectives), parties prenantes des “Portes du soleil” ;

– Courchevel, Méribel, Val Thorens et les Menuires, stations des “Trois vallées”.

Je pourrais citer d’autres domaines reliés dont certains ont fait des liaisons beaucoup plus difficiles à réaliser que celle que nous espérons.

Or, ces stations ont-elles perdu leur âme ? Non. Elles sont toujours reconnues pour ce qu’elles sont de par le monde.

Je voudrais aussi mettre en avant le poids politique et économique que prendrait le massif des Aravis dans les futurs contextes territoriaux et qui lui permettrait de mieux défendre ses intérêts.

Qu’en pensez-vous ?»

 


Réponse point par point d’André Vittoz, maire de La Clusaz

Pierre Baugey  : «Toutes les tendances vont dans  le sens des stations reliées par remontées mécaniques et par pistes.»

André Vittoz : Aujourd’hui, les efforts des stations vont naturellement vers le confortement du ski, la recherche de la garantie neige et la simplification du parcours clients. La liaison de tous les domaines skiables dans un rayon de 20 km autour de Saint-Jean-de-Sixt serait effectivement un moyen d’y arriver. Elle doit permettre de compléter les investissements qui sont faits par les acteurs locaux pour développer la neige et moderniser les stations. Mais la liaison ne s’arrête pas à l’hiver, et notre territoire ne se limite pas à un domaine skiable ! Il faut en effet rappeler que nous avons lancé cet été les travaux pour créer une véritable piste forestière autour du Danay. Elle pourrait nous permettre de développer de nouveaux usages 4 saisons dans le Danay, entre Saint-Jean-de-Sixt, Le Grand-Bornand et La Clusaz. En outre, La Clusaz a porté dans son PLU un projet important de liaison des golfs des Confins et du Grand-Bornand qui, bien que contesté par les services de l’Etat, doit, lui aussi, nous permettre de diversifier notre activité. L’avenir de nos massifs passe donc par le confortement du ski, mais aussi par la diversification et par l’ouverture sur les territoires voisins, qui sont aussi nos premiers clients. Si la liaison entre Le Grand-Bornand et La Clusaz ne s’est pas faite avant la liaison entre Manigod et La Clusaz, c’est probablement par ce que nos anciens, dont on connait la sagesse, ne l’estimaient pas «naturelle».

 

Pierre Baugey : «Une liaison par route compte peu, on le sait.»

André Vittoz : Certes les liaisons routières sont difficiles à valoriser vis-à-vis des clients. Pour autant, la mobilité sur notre territoire doit être développée et nous devrons rechercher des solutions innovantes entre nos villages et nos villes, qu’il s’agisse de solutions par la route… ou par le câble… La CCVT travaille avec ardeur sur ce sujet dans le cadre de la révision du SCOT, pour trouver des solutions durables pour l’accès à nos territoires et régler la question des flux qui ont tendance à augmenter significativement.

 

Pierre Baugey   : «La plupart de ces liaisons sont très bénéfiques ; c’est prouvé notamment par le produit fiscal annuel des communes publié par le ministère du Budget qui augmente de 15 à 20 % pour les communes les années qui suivent leur liaison.»

André Vittoz : Les différentes réformes fiscales qui se sont succédé en moins de 10 ans ont mis à genoux les collectivités territoriales. Aujourd’hui la fiscalité professionnelle est perçue par la CCVT, privant ainsi les communes du dynamisme créé par leurs investissements. Ce qui signifie que les investissements qui seront réalisés pour les liaisons seront supportés par les collectivités, sans recherche de rentabilité à court terme…

 

Pierre Baugey : «Cette liaison nous ouvrira encore plus les marchés touristiques étrangers qui sont porteurs d’avenir et d’opportunités.»

André Vittoz : La liaison est effectivement un excellent argument pour la promotion de nos massifs ! Mais n’oublions pas que le démarchage des marchés étrangers est parfois difficile du fait des spécificités de nos stations : nous sommes des villages, avec du patrimoine, des alpages et du caractère ! Il nous manque donc de grosses unités d’hébergement pour accueillir des groupes complets de touristes étrangers. Contrairement aux grandes stations de Tarentaise, nos stations et nos petites structures touristiques ne peuvent pas, à l’heure actuelle, recevoir les grands tours operators étrangers. Il faut tenir compte de notre authenticité et essayer de rester fidèles à nos valeurs. C’est ça qui fait notre différence…

 

Le maire du Grand-Bornand a également été sollicité suite à ce courrier mais à l’heure de boucler ces pages, il n’avait pas envoyé de réponse.

 

 

Commentaires des internautes
Vincent - le 06/04/2020 à 11:11
Personnellement , je suis pas favorable à une liaison filière entre les deux stations. Cet espace est un des derniers espaces encore vierge de toute exploitation commerciale du massif. La piste forestière nouvelle est en soi déjà une dégradation suffisante du massif forestier pour qu'on l'élargisse à une exploitation mercantile : elle permet de pratiquer le ski de fond et la randonnée aux vrais sportifs à l'abri de la circulation effrénée des skieurs alpins et des surfboarders ! Par ailleurs, chacun sait que derrière ce projet se cachent des projets de construction de "resorts"touristiques gigantesques que les promoteurs n'ont de cesse de faire valoir auprès des élus locaux et des autorités administratives ! Je suis personnellement étonné, qu'après nous avoir fait accepté un Scot il y a même pas 4 ans, présenté comme valable pour une bonne dizaine d'années, on nous demande de le réviser pour y inclure de nouveaux projets d'UT (Unité touristique) démesurées pour le site des Aravis alors même que les infrastructures routières sont limitées et déjà saturées depuis longtemps. Comment croire après cela à la pérennité des Scot, des PAD et autre PLU, qui ne sont que des appellations obscures de fonctionnaires destinées à masquer une politique de surexploitation commerciale de sites remarquables par des groupes privés puissants. Je ne souhaite pas que La Clusaz ou Le Grand-Bornand deviennent de nouveaux Méribel ou Courchevel !
Je précise que je suis originaire d'Annecy, résident secondaire de La Clusaz depuis 28 ans et membre de l'ARLC (Association des résidents de La Clusaz)!
Quoi de plus authentique que de déguster l'été de bonnes beugnettes frites bien croustillantes l'été au col des ânes ou un bon reblochon à la ferme de Lorette à Beauregard, arrosés d'un verre d'Apremont bien frais après une bonne randonnée de quelques heures dans les alpages !
Aravisement vôtre !
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Courrier des lecteurs
Faisant suite à l’ouverture de l’enquête publique concernant la révision partielle du schéma de cohérence territoriale (SCoT) sous l’égide de la Communauté de communes des vallées de Thônes, qui s’est déroulée du 7 décembre au 8 janvier, nous avons reçu un courrier de Madame Catherine Garrigue de Jouars-Pontchartrain (78) et résidente au Grand-Bornand. Il s’agit d’une lettre envoyée à la ministre de la Transition écologique, Elisabeth Borne.

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